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mardi 19 mars 2024
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Pour une réouverture intelligente de l’Afrique

Le monde se rouvre à l’activité sociale et économique après de nombreux mois de confinements et autres mesures restrictives visant à freiner la propagation de Covid-19. Il est devenu clair que, malgré tous les efforts déployés au niveau mondial, la maladie restera parmi nous plus longtemps que prévu. En effet, tant qu’un vaccin n’aura pas été mis au point, la maladie devrait continuer, bien qu’à un rythme réduit, à se propager au sein des populations et à avoir un impact sur les activités économiques.

Le défi pour les gouvernements est de savoir comment contrôler la propagation de la maladie tout en permettant à l’activité économique indispensable de fournir et de protéger les moyens de subsistance. En particulier en Afrique, où les systèmes et les institutions ne sont pas aussi efficaces que ceux de pays plus avancés.

Je ne peux que féliciter les États africains et leurs gouvernements d’avoir été à la hauteur de la situation et d’avoir réduit le nombre de décès causés par les infections du Covid-19, en dépit des défis relatifs aux infrastructures et aux institutions auxquels ils sont confrontés.

Aujourd’hui, ma crainte est que l’assouplissement des mesures de confinement et la réouverture de ces pays ne conduisent à un recul par rapport aux résultats enregistrés ces six derniers mois, à moins que cela ne soit conduit de manière intelligente et responsable. Il est donc primordial que le continent continue à coopérer et à adopter une approche coordonnée en matière de réouverture.

Au plus fort de la crise, un comité de pilotage panafricain pour la gestion de la crise (Aftcor) a été constitué, soutenu par un fonds commun mobilisé par le secteur privé continental. Certains de nos leaders les plus renommés ont été désignés pour veiller à ce que l’Afrique ne parle que d’une seule voix.

Et, partout, il a été suggéré que la crise était à la fois l’impulsion la plus puissante et l’occasion la meilleure pour accélérer l’émergence du marché unique, à travers la ZLECAf (Zone de libre-échange continentale africaine), pour accroître ainsi l’autonomie et la résilience.

Éviter un nouveau retard de la ZLECAf

Nous sommes aujourd’hui à l’épisode le plus critique de la crise. La réouverture de nos frontières, ainsi que l’assouplissement des politiques de confinement dans nos différents pays, exigent que nous restions vigilants. C’est la seule façon de garantir que nous impulserons à nos économies l’élan requis tout en nous remettant de la catastrophe du Covid-19.

Déjà, la pandémie nous a contraints de manquer la date tant attendue de 2020 pour le lancement des échanges commerciaux dans le cadre de la ZLECAf. Nous ne pouvons pas nous permettre de rater la nouvelle date de janvier 2021, si nous voulons réaliser des progrès significatifs en matière de relance économique.

J’estime qu’une menace majeure pour le commerce de la ZLECAf – et en fait pour les activités économiques en général sur notre continent –, réside dans une flambée des infections de Covid-19, en raison des mouvements transfrontaliers à mesure que nous rouvrirons le commerce et les affaires.

Comme nous l’avons vu ailleurs dans le monde, la technologie joue un rôle critique pour nous aider à faire face à cette menace. Je suis encouragé par l’intervention de divers organes de l’Union africaine, tels que le CDC Afrique, le département du Commerce et de l’industrie, la Commission africaine de l’aviation civile, l’Organisation africaine de normalisation et le Conseil africain de la recherche scientifique et de l’innovation.

Ces organismes travaillent en partenariat avec des organisations multipartites du secteur privé, notamment AfroChampions, l’Office du tourisme africain, l’Organisation des zones économiques africaines et Koldchain BioCordon, pour trouver des solutions technologiques à certains de ces défis. Et le plus remarquable c’est que toutes ces plateformes de « biens numériques publics » ont été mises à disposition gratuitement aux gouvernements et aux citoyens africains.

Ces solutions intelligentes, souvent propulsées par les technologies numériques, sont urgentes et cruciales. Je songe à PanaBIOS, pour permettre les déplacements transfrontaliers sans risquer une flambée des infections.

Et à d’autres dans le cadre de la plateforme virtuelle d’échanges AVRIVA (African Virtual Resilient-Integration for a Vibrant Africa). Ces innovations sont conçues pour permettre aux gouvernements africains de franchir l’échéance de janvier 2021 et de lancer les échanges commerciaux dans le cadre de la ZLECAf en mettant en ligne toutes les négociations en cours. En tant que telles, elles méritent le soutien total des États membres.

Un coût évitable pour les Africains

D’autres, tels que TribeID, qui vise à transformer la capacité des plateformes du commerce électronique pour faire des PME africaines le cœur battant de la ZLECAf, sont d’une importance structurelle considérable si la ZLECAf doit devenir plus qu’un simple manuscrit, et non pas un autre accord de Yamoussoukro. Lequel devait ouvrir le ciel africain mais n’a pas été mis en œuvre de façon complète et adéquate.

Prenons l’exemple du problème que PanaBIOS est censé résoudre : comment les tests effectués partout sur le continent et les résultats des tests numériques générés par des laboratoires mutuellement reconnus dans différents pays africains peuvent-ils être fiables pour les déplacements transfrontaliers ?

L’alternative à ce cadre, TrustedTesting, inspiré du CDC Afrique, serait le chaos, la confusion et l’énorme inconvénient en matière de temps et de coût que représente le fait que chaque pays africain exige de chaque voyageur qu’il effectue des tests à son arrivée, des tests avant son départ et des tests pendant son transit !

Pour les Africains des régions les moins connectées du continent, cela pourrait bien représenter 500 dollars de tests pour un seul voyage. Juste pour le « privilège » de voyager sur son propre continent ? C’est précisément pour résoudre ce type de problèmes que la coopération africaine a été conçue et que les solutions technologiques nationales africaines, comme PanaBIOS, sont aujourd’hui à la disposition de nos leaders pour aborder la situation de manière judicieuse et efficace.

Le fervent espoir de tous les panafricanistes est que ce continent ne gaspille pas cette crise. Que nous accueillons cette réouverture prochaine pour collaborer avec intensité et montrer au monde entier l’ingéniosité, le cran et la clairvoyance dont est béni l’Africain, si souvent marginalisé dans le système international. La pandémie doit être transformée en une opportunité pour renverser la situation.

OLUSEGUN OBASANJO, ancien président du Nigéria 




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