Le 16 mars, fratmat.info, le site internet du journal Fraternité Matin, a informé ses lecteurs de la cessation des activités de Dénia Ivoire, basée à Grand-Bassam. Pour l’auteur de l’article, l’usine marocaine (spécialisée dans la transformation de noix brutes de cajou), « n’a pas pu résister à la concurrence asiatique et à la crise mondiale de la transformation de cajou ». Le journaliste affirme avoir eu cette précision des « premiers responsables » de l’unité industrielle, sans toutefois donner le nom d’un seul dirigeant. Ajoutant que « faute de marge et d’approvisionnement régulier en noix brutes durant 3 ans, l’usine Dénia, d’une capacité de 17.000 tonnes et qui employait 2.000 personnes, a-t-elle aussi été contrainte d’arrêter ses activités de transformation à la suite de pertes importantes accumulées depuis 3 ans ».
Les jours suivant la diffusion de l’article, des journaux en ont fait leur chou gras en le reprenant à la lettre dans leurs parutions. D’autres se sont fondus en accusations contre l’organe de régulation de la filière cajou, sans se douter de l’inexactitude des propos du journaliste auteur de l’article. Ses difficultés à donner la raison précise de la cessation d’activités de Dénia Ivoire – faisant pratiquement du coq-à-l’âne dans l’article en évoquant « la concurrence asiatique », « la crise mondiale de la transformation de cajou » et « la crise en Ukraine » – montre qu’il s’est limité au simple constat de la fermeture de l’usine pour tirer ses propres conclusions sur la cause. Déduisant hâtivement que l’unité de transformation fait face à un souci d’approvisionnement en noix de cajou, comme d’autres avaient fermé avant elle pour le même motif.
Sauf que le cas de Dénia Ivoire est différent. L’usine n’a pas arrêté ses activités faute de matière première pour fonctionner. Il est peu raisonnable qu’elle ferme pour ce motif alors que la Côte d’Ivoire, premier producteur mondial, est en pleine campagne de commercialisation du cajou. Période où les noix brutes sont à profusion partout dans les zones de production. L’entreprise marocaine, qui pèse 20 millions d’euros en investissements (plus de 13 milliards de francs CFA), ne peut pas manquer de moyens financiers pour constituer des stocks d’anacarde brute sur 1 an.
La cause de l’arrêt de l’usine est ailleurs. Sa fermeture, qui est temporaire, reste consécutive à une « réduction du temps de travail ordonnée par les autorités en charge de l’environnement », selon une note interne de l’usine que nous avons consultée. Des raisons environnementales ont donc conduit à la cessation d’activités. Pas autre chose, comme relayé ici et là. La situation a amené la direction de l’entreprise à mettre en chômage technique les salariés bien avant. Le temps de repos forcé des employés a même été prorogé pour une période allant du 8/2/2024 au 7/4/2024. « Nous vous assurons que toutes les dispositions sont prises pour trouver des solutions qui nous permettront de rétablir le bon fonctionnement de notre exploitation dans les conditions normales », rassure la note de mise en chômage technique.
En Côte d’Ivoire, le prix d’achat officiel du kilogramme de cajou aux producteurs a été fixé à 275 francs CFA. Dans des parties du territoire, le produit est vendu à 300 francs CFA. Soit 25 francs CFA de plus.
OSSÈNE OUATTARA