Search
vendredi 29 mars 2024
  • :
  • :

La plupart des articles sur l’Afrique publiés par les médias africains proviennent d’agences de presse étrangères

Selon un rapport d’Africa No Filter, un tiers des articles sur l’Afrique publiés par les organes d’information du continent proviennent d’agences de presse étrangères. Intitulé « How African Media Covers Africa » (Comment les médias africains couvrent l’Afrique), le rapport souligne le fait que les récits concernant l’Afrique continuent d’être présentés à travers le prisme des mêmes stéréotypes et points de vue négatifs sur la pauvreté, les maladies, les conflits, la médiocrité de la gouvernance et la corruption.

Dans le cadre de l’enquête menée entre septembre et octobre 2020, 38 rédacteurs africains ont été interrogés et le contenu de 60 médias de 15 pays (Botswana, Afrique du Sud, Zambie, Zimbabwe, RDC, Égypte, Tunisie, Tanzanie, Éthiopie, Kenya, Rwanda, Ouganda, Ghana, Nigéria et Sénégal) a été analysé. En outre, 4 groupes de discussion ont réuni 25 rédacteurs en chef de médias africains, d’agences et des correspondants internationaux. Les résultats confirment les défis et expériences qui sont de notoriété publique dans le secteur : les recettes publicitaires et le nombre de salles de rédaction diminuent. Ce qui a une incidence sur le type d’informations que les Africains lisent, et les actualités sont majoritairement négatives et liées à des conflits.

Les principales conclusions du rapport soulignent que les sources de collecte des informations sur les pays africains sont problématiques, que les contenus qui en résultent continuent à faire le lit de stéréotypes éculés. La qualité du journalisme local rend souvent impossible la production d’une narration nuancée et mise en contexte lorsqu’il s’agit d’écrire des articles sur les 54 pays africains. 63% des médias interrogés n’ont pas de correspondant dans d’autres pays d’Afrique. Un tiers de toute la couverture de l’Afrique est issue de sources non africaines. L’AFP et la BBC représentent un quart de tous les articles recensés dans les médias africains sur d’autres pays africains.

La contribution des agences de presse africaines est faible. 81% des articles analysés entrent dans la catégorie « hard news » (actualités factuelles) : les conflits et crises déclenchés par des événements donnés, qui sont de nature principalement politique. 13% des informations sont axées spécifiquement sur la violence politique, les troubles civils et les conflits armés. L’Afrique du Sud, suivie de l’Égypte, sont les pays dont la couverture est la plus diversifiée et pas nécessairement liée à des événements d’actualité. Ce qui signifie que ces 2 pays sont probablement les « mieux connus » du continent. « Les médias ont une énorme influence sur l’établissement de la ligne éditoriale et sur le choix des articles consacrés à l’Afrique », déclare Moky Makura, directrice générale d’Africa No Filter. « L’enquête a montré clairement que, malgré des années d’indépendance, ce ne sont toujours pas les Africains qui tiennent la plume lorsqu’il s’agit d’écrire les histoires qui les concernent. Plus important encore, au travers des articles que nous partageons dans nos médias, nous continuons à colporter l’image d’une Afrique divisée, dépendante et manquant d’engagement. Il faut que nous reprenions la plume ».

Moky Makura ajoute que « paradoxalement, 50% des rédacteurs en chef interrogés estiment que leur couverture des pays africains autres que le leur ne contient pas de stéréotypes. Cela signifie clairement que nous devons faire de gros efforts pour nous auto-éduquer et changer le rôle que nous jouons dans la perpétuation de stéréotypes dépassés sur nous‑mêmes. Les récits ont une grande importance et leur influence va au-delà de la simple narration. Ils ont un impact sur l’investissement en Afrique, sur la jeunesse et les opportunités que les personnes perçoivent dans leurs pays, sur la migration, la créativité et l’innovation ».

À la suite de ce rapport, Africa No Filter a décidé de lancer la toute première agence de presse du continent qui se concentrera sur des récits ayant pour sujet la créativité, l’innovation, les arts, la culture et la dimension humaine, afin de combler cette lacune du secteur.




Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *